En ce jour historique du vingt-six août deux mil douze, bien revigoré après ma halte à Algéciras, avec un esprit conquérant, tel Scipion l'Africain, j'ai posé le pied sur le continent africain !
J'ai d'ailleurs posé tout le reste par la suite, pour bien marquer le coup, une fois que la fatigue m'avait bien marquée.
Tout de suite après être sorti du port de Tanger Med, j'ai pu me mettre en route, à pied et sur un chemin. Génial, non ! Et en plus il ne faisait pas chaud, comparé à ce que j'avais connu à Antequera quelques jours plus tôt.
Au bout d'une heure, un marocain m'a invité à boire un coup avec lui ; on a échangé deux/trois mots en espagnol puis j'ai repris mon chemin. Pour le déjeuner, je n'avais qu'un paquet et demi de prince - prévu pour deux jours ;( - alors je n'ai mangé que quelques uns de ces délicieux (en cette circonstance en tout cas) biscuits. J'étais alors à côté d'un lac de barrage, à l'ombre d'un grand chêne, en train d'attendre que le soleil se fasse moins assommant, quand un grand-père et ses deux petits-fils sont arrivés pour également s'abriter des durs rayons de notre cher astre céleste. Avec eux j'ai communiqué uniquement par signes, car ils ne parlaient que l'arabe, à moins que ça ne soit une variante berbère (bien possible car ça ne ressemblait pas à ce que j'ai entendu par la suite). Ce qui compte surtout, c'est qu'ils étaient gentils, avaient le sourire et m'ont invité à partager le repas qu'ils ont cuisiné pour le midi :). Sur un feu de bois !!!! Au Maroc alors que tout est sec !!! Le feu de forêt sera pour une prochaine fois, et j'ai pu me repaître gaillardement, presque trop même car le vieux voulait que je mange beaucoup pour être sûr que je serai en forme pour la marche. C'était bien marrant.
J'ai continué de marcher dans un environnement assez sauvage, sans qu'il ne fasse trop chaud, c'était agréable.
J'ai passé une nuit un peu bizarre, tranquillement dans mon coin comme d'habitude, mais durant laquelle j'ai eu trop chaud au début, et froid à la fin. Pas hyper reposant quoi.Trop chaud parce que la chaleur emmagasinée au cours de la journée met du temps pour se dissiper, et aussi parce que le même phénomène se passe avec le sol, encore brûlant lorsque le soleil se couche. Ensuite, ben et le corps et le sol refroidissent, et je me suis donc retrouvé à m'habiller au milieu de la nuit, et c'était vraiment à la limite de suffire à la fin.
su
Le lendemain, au fur et à mesure que je m'éloignais de la côte, je me rapprochais de la chaleur africaine. Et aussi de plein de bleds, car je m'approchais de Tétouan (avec dans le viseur Chefchaouen, environ soixante kilomètres plus loin). A vingt kilomètres de Tétouan environ, j'avais dû faire grosso modo soixante ou soixante-dix kilomètres depuis mon départ la veille, j'ai décidé de faire une pause. Il était 13h30 heure espagnole, et c'était bien nécessaire ; il me fallait attendre pour refroidir car je n'en pouvais plus. J'ai bu et mangé quelques princes, et attendu, attendu, attendu. Et pas moyen de refroidir, le système interne prévu à cet effet était en panne, pour cause d'excès de chaleur stockée j'ai subodoré.
J'étais donc réfugié depuis un moment dans une sorte d'abri bus, lieu de mon frugal déjeuner, à l'abri duquel les marocains attendent pour faire du stop ou prendre les minibus, quand un vieux fumeur de kif est arrivé et a commencé à converser avec moi en espagnol. Il en connaissait quatre mots et moi trois, autant vous dire que comparé au midi précédent, on a eu une véritable conversation ! On a ensuite pris tout les deux un minibus, défoncé et bondé, qui a déposé tout le monde au "gros" bled le plus proche. Là, le vieux fumeur de kif m'a invité dans son restaurant habituel, où il connaissait tout le monde, et où j'étais une espèce d'attraction. Et toujours pas un gus qui savait parler français. Il a entrepris, avec les quatre élus qui étaient autour de le même table que nous, de m'apprendre divers mots d'arabe. Il a guetté le bus, et quand celui-ci est arrivé, il a dit au chauffeur de m'attendre (je suppose), et je suis monté dedans.
A la sortie du bus à Tétouan, j'ai rencontré en la personne du chauffeur la première personne parlant français depuis mon départ de Grenade. Et ça tombait particulièrement bien car je voulais rejoindre la gare routière, sans avoir la moindre idée d'où celle-ci se situait. Il m'a indiqué le chemin, efficacement, et je suis arrivé sans encombre. Le chemin était long mais facile (à défaut d'être une route droite mais raide).
A la gare, j'ai pris un ticket pour Chefchaouen à un vendeur à la criée (pas au guichet quoi) en même temps qu'un autrichien ; le vendeur nous a dit que le bus était pour 19h (j'étais passé à l'heure marocaine entre temps), et on est monté direct dans un bus pour Chefchaouen en attendant qu'il parte. Ce qu'il a fait vers 18h15 je crois. Pas de contrôle de billet, mais je suppute fortement qu'ils savent tous plus ou moins ce qu'il se passe, et donc tenter de le faire sans prendre le billet au préalable demande un fort goût du risque. On a discuté, Willy, sa femme et moi, durant le trajet, et une fois arrivé à Chefchaouen ils m'ont proposé d'aller au même hôtel qu'eux, au début de la médina ; un hôtel qu'ils connaissaient pour y être déjà passés.
Je précise à ce stade de mes péripéties qu'ils ont l'âge d'être mes grands-parents et habitent au Maroc depuis plus de dix ans, d'abord à Tanger puis actuellement à Tarfaya, au sud.Je suis d'ailleurs convié à leur rendre visite au passage de ma grande descente vers le sud.
A l'hôtel, pas de place !! Alors le patron a arrangé une remise en chambre trois places, et on a dormi là. Le lendemain, une chambre double s'est libérée pour eux et une chambre simple pour moi. Et c'est tout !! Quelle chance. En plus, après mon inspection des autres hôtels de la médina durant la journée, j'ai constaté que c'est un des moins chers. Et que beaucoup d'autres hôtels étaient complets.
C'est quand même pas le grand confort, la chambre est petite, les douches et toilettes communes, et pas très propres. Les toilettes sont à la turque, ça ne me change pas beaucoup du plein air^^. J'ai cette chambre pour 65 dh (diviser par 10 pour avoir le prix en €), c'est le prix haute saison car c'est encore blindé de touristes.
Le truc bien, c'est que dans cet hôtel pas cher, il n'y a que des touristes marocains, alors je suis bien immergé dans la culture marocaine quand même. Hier je suis allé dîner avec Abdelrahim, un marocain de Casablanca, en vacances pour quatre jours ici. Il est reparti aujourd'hui ; il était très sympa.
Côté tourisme, j'ai fait plusieurs fois le tour de la médina, fraîche et donc agréable, et bien bleue comme je l'avais lu dans des guides. C'est très joli, le lieu est très propice à une pause pour que j'apprenne les rudiments d'arabe je pense. Je suis allé aussi en peu dans les montagnes ; Chefchaouen est adossée à des montagnes. Hier, j'ai fait une séance photo - voir cet album (à paraître bientôt) - et je commence à prendre mes marques. J'ai lu un bouquin au frais, à l'ombre d'un arbre à côté de la "rivière", on m'a pris pour un local parfois^^.
J'ai décidé de changer d'approche quant à ma façon de voyager ; marcher dans ce pays alors qu'il fait chaud, en plus sans être dans des zones sauvages comme l'Atlas, demande un entêtement que je n'ai pas. Ce n'est pas ce que je veux vraiment, il y a d'autres moyens de découvrir le Maroc et de faire des rencontres. Et puis, il faut que j'apprenne l'arabe d'urgence, c'est essentiel pour les missions d'infiltration (les grandes campagnes, telles celles de Napoléon ou de Scipion, c'est dépassé de nos jours).
J'ai l'impression que je me fonds déjà bien dans le décor (la barbe sûrement^^), vu que des gens me demandent de temps en temps des renseignements, en arabe !!! C'est flatteur ! Mais juste après, patatras, je suis démasqué dès que j'ouvre la bouche.
Je vais donc acheter un mini-dictionnaire et une sorte de guide de conversation aujourd'hui, pour connaître au moins les bases.
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